Après le désastre de Fukushima, État, mafia, experts, contre-experts, « mouvements citoyens » et fondations diverses sont devenus les co-gestionnaires des catastrophes en chaîne. Au point que chaque intervenant se voit l'artisan de sa propre destruction.
Pour Thierry Ribault (CNRS/ MCJ), cette catastrophe illustre les limites des sociétés industrielles à l’aube du XXIe siècle. L’État, qui ne peut plus gérer les accidents de son développement, délègue à d’autres le soin de le faire à sa place. Les gens qui « s’engagent » sont confrontés à un dilemme insoluble : la non-information rend leur action nécessaire, mais ils ne peuvent apporter de solution. Les populations restent sur place, tétanisées par la propagande, qui les confine au « suicide » collectif. Incapables de décider de sauver leur vie, ils servent, dans l’attente de leur mort déclarée probable, de cobayes à une certaine « science », eugéniste et à certains égards, « radio-négationniste » (attitude niant les nuisances de la radioactivité).
Face à l'instillation de cette propagande, Thierry Ribault souhaite mettre en lumière certaines initiatives citoyennes, et questionner le sens qu'on peut leur donner et comprendre leur impact. Loin d’une glorification de la « société civile » ou des « mouvements citoyens », le désastre de Fukushima met au grand jour la prise de conscience de l’épuisement d’un système et l’existence d’une volonté, au sein de la société japonaise, de bouleverser ce système.