Kaléidoscope ukrainien
L'exposition donne à voir la diversité culturelle et linguistique de l'Ukraine, en retraçant l'histoire de ses régions et de l'édition locale, de la Galicie à la mer Noire.
Commissariat
Iryna Sobchenko, chargée de collections pour le domaine ukrainien à la BULAC, avec la participation des différents chargés de collections impliqués dans le choix des documents.
Remerciements : Mykola Symchych, institut de philosophie Skovoroda, Académie nationale des sciences d'Ukraine
Introduction
Point de départ de cette exposition, l’image du kaléidoscope invite à porter le regard sur la diversité de la culture ukrainienne à travers ses régions historiques et ses territoires transfrontaliers. Cet espace a vu naître des générations d’intellectuels dont l’inventivité, la créativité ont permis de construire une Ukraine aux multiples facettes, de dessiner et de fonder une culture propre et de lutter contre l’identité coloniale imposée.
Les cinq thématiques de l’exposition nous invitent à voyager à Kyiv, en Galicie, à Dnipro, à Kharkiv, à Lviv, en Bucovine, à Tchernivtsi et jusqu’aux rives de la mer Noire. La sélection de 31 documents est composée d’œuvres littéraires et scientifiques, de livres illustrés, de brochures, de cartes et de cartes postales. La majorité des ouvrages ont paru en Ukraine aux XIXe et XXe siècles (à Kyiv, Kharkiv, Lviv, Odessa) et quelques documents proviennent de France, d’Israël, de Turquie et de Russie.
L’exposition tisse des liens entre des textes en sept langues : ukrainien, français, yiddish, hébreu, grec, russe et turc ottoman. Dix-huit ouvrages, publiés entre 1920 et 1930, mettent en lumière le phénomène de la Renaissance fusillée, génération d’écrivains, d’artistes, de cinéastes et de chercheurs ukrainiens exterminée par la terreur stalinienne dont les œuvres ont été confinées dans les réserves spéciales des bibliothèques (les spetskhrans) et les noms effacés de l’espace public.
(Au)tour de l’image
La première sélection d’ouvrages introduit quelques facettes de la dimension visuelle des lettres ukrainiennes tout en mettant l’accent sur le début du XXe siècle, la période charnière où l’espace intellectuel d’Ukraine se révèle dans toute sa complexité. Hétérogènes dans leur forme, ces documents ont un but commun : donner à voir. Ils permettent d’incarner les personnages fictionnels, comme le font les illustrateurs de L’Énéide et des contes populaires. Deux cartes, datant de 1918 et 1923, visualisent les résultats des recherches ethnolinguistiques qui portent le témoignage du destin des générations disparues et dénoncent les génocides. Une collection rare de cartes postales sur l’art ukrainien, publiée entre Kyiv et la Galicie, révèle l’histoire d’un livre inédit de Kostyantyn Chyrotsky, anthropologue passionné qui a sillonné les régions de son pays natal pour collecter son patrimoine.
Війна грибів з жуками : народна байка
La guerre des champignons contre les bousiers : conte populaire
Le roi Bolet lève une armée pour partir en guerre contre les bousiers. La population de son royaume est divisée : les Pholiotes, les Agarics, les Suillus et les Gyroporus ont peur de prendre les armes, alors que les Tylopilus, les Lactaires, les Cortinaires, les Russules et les Amanites ne veulent pas se laisser manger. Unis, ces braves champignons combattent les ennemis, mais un accident les empêche d’exterminer les coléoptères - par inadvertance, le roi Bolet tombe dans une casserole de borchtch chaud. Ce conte populaire, publié en 1919 à Prague, est illustré par Okhrim Sudomora (1889-1968), graphiste de Kyiv auteur de plusieurs livres illustrés pour la jeunesse. En 1949, il est condamné à 25 ans de camp de travail pour une caricature de Staline, et amnistié en 1955. La Guerre des champignons a inspiré d’autres graphistes, dont Gueorgui Narbout en 1909 et Nikita Kravtsov en 2022, pour la version contemporaine adaptée par Andreï Kourkov.
Енеїда
Énéide
En 1798, Ivan Kotliarevsky écrit son interprétation burlesque de l’épopée de Virgile afin de dresser le portrait historique et culturel de l’Ukraine, en transformant l'œuvre classique en hypertexte baroque, remarquable du point de vue de l’expérimentation stylistique et linguistique. Riche de 7 000 mots et expressions argotiques, son vocabulaire couvre tous les domaines de la vie quotidienne - les mœurs de diverses strates sociales, la cuisine, les vêtements et les intérieurs, les noms des animaux et des plantes, des outils et des armes.
Parmi les nombreuses éditions illustrées de L’Énéide, la plus populaire est celle créée par Anatoliy Bazylevytch, parue aux éditions Dnipro en 1968 et réimprimée 17 fois. L’Énéide, publiée à Berlin en 1922, est ornée de dessins à l’aquarelle d’Adalbert Stiren, originaire de Saint-Pétersbourg, immigré en Allemagne. Cette édition, interdite en URSS, est préparée et préfacée par Bohdan Lepky, écrivain et chercheur ukrainien en exil.
Діялектологічна класифікація українських говорів
Classification dialectologique des patois ukrainiens
Vsevolod Gantsov (1892-1979) est l’auteur des recherches fondamentales sur l’histoire de la langue ukrainienne et de ses dialectes. Son étude de terrain publiée en 1923 démontre la portée de deux groupes principaux de patois - ceux du nord et du sud. Sa carte dialectologique reflète l'état de l’ukrainien parlé en Ukraine des années 1920, avant le Holodomor, le repeuplement et la russification de l’est et du sud du pays. À cette époque, Gantsov travaille sur la normalisation des règles d’orthographe, connus plus tard comme « orthographe de Kharkiv », ou Skrypnykivka.
Comme d’autres membres de la Commission nationale de l’orthographe, Gantsov devient une cible des répressions staliniennes qui mettent fin aux processus d’autonomisation culturelle et politique dites d'ukrainisation. La réforme de l’orthographe de 1933 impose de nouvelles règles qui, de manière artificielle, rapprochent l’ukrainien du russe. Condamné en 1930 dans l’affaire de l'Union pour la libération de l'Ukraine, l’un des nombreux « procès pour l’exemple », Gantsov a passé 17 ans en détention et 5 ans en déplacement forcé.
Carte ethnographique de l'Europe
Conçue par le Lituanien Juozas Gabrys-Paršaitis à l’aube de la Conférence de la Paix de 1919, cette carte donne une vue globale du paysage éthnique européen à la veille de l’installation des frontières de l’URSS. On y note la forte concentration des Ukrainiens dépassant les frontières actuelles du pays, notamment, à Kouban et à l’est de l’Ukraine slobodienne (vers Voronej et Koursk), ainsi que la présence des minorités ethniques principales - les Grecs, les Tatares de Crimée, les Bulgares et les Roumains, au sud et au sud-ouest du territoire ukrainien. Ancien élève de l’université d’Odessa (1907) exilé de Lituanie, Gabrys-Paršaitis s’intéressait à l’Ukraine, son pays natal ayant également subi la domination de l’Empire russe. Avec Jean Pélissier, il a fondé l’Union des Nationalités (1912-1919) dans le but de soutenir des peuples opprimés.
Art ukrainien : 186 cartes postales [sélection]
Publié en 1918-1919 aux éditions Drukar (L’Imprimeur) et Halytska nakladnya (L’imprimerie de Galicie), cet ensemble unique de cartes postales monochromes comprend 13 séries thématiques de reproductions d’œuvres d’art et d’artisanat ukrainiens du XVe au XIXe siècle (portraits, icônes, architecture, céramique, textile, peinture, gravure, armoiries et enluminures etc.). Les clichés qui ont servi de base pour les visuels sont issus de l’ouvrage inédit de l’historien d’art Kostyantyn Chyrotsky (1886-1919), L’Histoire de l’art ukrainien en deux volumes avec 250 illustrations, qui devait sortir chez Drukar. La valeur de cette édition des cartes postales réside dans la qualité exceptionnelle de la sélection qui donne une vision globale de l’art d’Ukraine tout en faisant découvrir des œuvres rares et méconnues.
Au cœur des lettres
La Naddnipryanshchyna (l’Ukraine de Dnipro, centre) et la Sévérie (nord) sont des régions historiques qui ont vu naître des villes millénaires, centres politiques et intellectuels, de l’époque de la Rus’ de Kyiv jusqu’à nos jours. L’importance de Kyiv, Poltava, Tchernihiv, semble être d’autant plus manifeste que ce cœur de l’Ukraine a toujours su retrouver son battement singulier, même au cours des périodes de perte d’autonomie politique. Notamment, pour résister, à partir du XVIIe siècle, aux pratiques continues de linguicide et d’assimilation sous l’emprise de l’Empire russe. C’est ici que se cristallise, entre les murs de l’Académie de Kyiv Mohyla, la pensée intellectuelle, et qu’évolue, au sein d’un laboratoire littéraire puissant, la langue ukrainienne, à partir du dialecte de la région de Poltava, où sont nés les historiens Mykhaïlo Drahomanov et Fedir Savtchenko, et l’écrivain Ivan Kotliarevsky. Celui-ci crée, en 1798, son Énéide, poème kaléidoscopique et subversif qui marque le début de la littérature ukrainienne moderne.
Виргиліева Энеида
L'Énéide de Virgile
« Énée fut un garçon agile / ce brave cosaque, ce bon roublard / de toutes les fourberies habile / le plus futé de tous les gars [… ] » Ainsi commence l’œuvre fondatrice de la littérature ukrainienne moderne, écrite par Ivan Kotliarevsky, homme de lettres originaire de Poltava. Publiées d’abord en 1798, les trois premières parties de L'Énéide sont ensuite complétées par une quatrième partie en 1809. Parmi les livres les plus anciens et rares du fonds ukrainien de la BULAC, on trouve la première édition complète de l'œuvre contenant six parties, réalisée à titre posthume en 1842.
Si L'Énéide ukrainienne s’inspire de l’œuvre antique, ce n’est pas pour imiter son contenu, mais pour s’inspirer de sa forme. En effet, l’épopée de Kotlyarevsky est un texte proche de l’esprit de l’avant-garde des années 1920 dans la mesure où il fait appel à la culture populaire pour déconstruire les mythes (impérial, national, héroïque etc.) à travers le jeu entre tradition et modernité. Son ironie vise en particulier l’effacement colonial de la mémoire collective, car les aventures de l’Énée ukrainien se déroulent à l’époque de la Sitch Zaporogue, république cosaque démolie par Catherine II en 1775. Ainsi, L'Énéide de Kotlyarevsky marque la nouvelle étape dans l’évolution des lettres parce qu’elle montre que l’on peut écrire et publier les œuvres littéraires en ukrainien. Cela est particulièrement important dans le contexte de l’époque, car, à partir du XVIIe siècle, l’ukrainien subit la discrimination systématique de la part de l’Empire russe.
Духовный регламентъ Петра Перваго Императора
Règlement ecclésiastique de l'empereur Pierre Ier
Emblématique de la période fondatrice de l’Empire russe, ce document, rédigé en 1721 par Théophane Prokopovitch pour Pierre le Grand, démontre l’influence primordiale de Kyiv en tant que foyer intellectuel. Au début du XVIIIe siècle, soucieux des réformes administratives, Pierre le Grand fait venir à Moscou des professeurs et des étudiants de l’Académie de Kyiv Mohyla (fondée en 1632) pour y implanter des institutions universitaires de style européen. À partir de 1786, l’Empire russe gouverne la capitale ukrainienne qui devient sa ville la plus proche de l’Europe.
Ancien de l'Académie de Kyiv Mohyla aux services du tsar, brillant et ambitieux, Prokopovitch pose dans le Règlement ecclésiastique de l'empereur Pierre Ier les bases de l’administration centralisée. Celle-ci met l'Église sous le contrôle de l’État via l’institution du Saint-Synode, unifie le rite orthodoxe et renforce la censure, notamment à l’égard des pratiques divergentes dans certaines régions de la « Petite Russie » (dénomination coloniale de l’Ukraine). Parmi les anciens élèves de l’Académie de Kyiv Mohyla de cette époque, nombreux sont ceux qui n'acceptent pas l’identité imposée par l’Empire. Or, l’auteur du Règlement réussit à s'intégrer dans le système du pouvoir hiérarchique russe et contribue, avec beaucoup d'engagement personnel, au développement de la police secrète.
Le moment de la rédaction du Règlement ecclésiastique coïncide avec l’importante campagne de censure que le tsar Pierre Ier lance contre l’ukrainien : entre 1709 et 1729, les textes en ukrainien sont bannis des ouvrages religieux et de l’administration publique, la publication des documents officiels en ukrainien est interdite. La tendance à utiliser le linguicide en tant qu’instrument de domination coloniale persiste au sein de l’Empire russe au XIXe siècle. Cependant, l’essor de la vie culturelle et politique en Ukraine à cette époque-là témoigne de la capacité des langues minorées de survivre et de s’épanouir dans l’ombre, en dépit des interdictions.
La Littérature oukrainienne proscrite par le gouvernement russe
Заборона українства 1876 р.
Mesures prises en 1876 contre le mouvement ukrainien
L'oukase d'Ems, qu'évoquent Mykhaïlo Dragomanov et Fedir Savchenko dans leurs ouvrages, est l’un des actes les plus discriminatoires dans les trois siècles de l’oppression de la langue ukrainienne. Complétant les dispositions du circulaire Valouïev de 1863, ce décret du tsar Alexandre II promulgué à Bad Ems (Allemagne) interdit de publier et d’exporter les œuvres originales en langue ukrainienne, ainsi que les traductions en ukrainien et la musique notée. Il est également interdit de mettre en scène des pièces de théâtres et des concerts et de donner des cours en ukrainien dans les écoles et les universités.
En tant qu’écrivain de langue ukrainienne, historien et co-fondateur de Hromada, organisation politique et intellectuelle socialiste, active dans les années 1870, Mykhaïlo Dragomanov est directement concerné par l’oukaze d’Ems qui met fin à son activité professionnelle et l’oblige à quitter le pays. La Littérature oukrainienne proscrite par le gouvernement russe est une brochure que Dragomanov tente de distribuer aux participants du Congrès littéraire international de Paris 1878 afin de dénoncer publiquement cet acte d’oppression. La tâche s'avère difficile, étant donné que l'existence même de la littérature ukrainienne est largement méconnue en France à l’époque. Dans les comptes rendus du Congrès, Dragomanov figure sur la liste des participants, pourtant, on ignore si la prise de parole a effectivement eu lieu.
Cinquante ans plus tard, l’historien Fedir Savtchenko revisite ce sujet de manière plus poussée dans l’étude historique Mesures prises en 1876 contre le mouvement ukrainien qu’il écrit lors de sa mission de recherche à l’Académie des sciences d’Ukraine. Arrêté en 1931 juste après la publication de l'ouvrage, il passe cinq ans en détention et un an en exil pour disparaître sans trace dans les camps du NKVD vers 1938, peu après sa deuxième arrestation.
Граматка
Gramatka
Gramatka (1857) est le premier manuel d’ukrainien pour les écoles élémentaires en Ukraine sous la domination de l’Empire russe. Écrivain, ethnologue et historien originaire de la Sévérie (nord de l’Ukraine), Panteleïmon Koulich (1819-1897) crée l’orthographe phonétique de l’ukrainien (dite koulichivka), fondement de ce manuel destiné non seulement aux écoliers, mais également à toute personne souhaitant apprendre à lire et à écrire dans sa langue maternelle. À la différence de la yaryzhka (du yérou, la lettre ы), l’orthographe impériale qui transcrivait l’ukrainien avec les lettres de l’alphabet russe, la koulichivka s’adapte à l’usage courant, notamment, des lettres і et и. Proche du poète Taras Chevtchenko, Koulich est arrêté dans le cadre de l’affaire de la Confrérie de Cyrille et Méthode et a passé trois ans en déportation à Toula. Auteur du roman historique Le Conseil noir (1857), il enrichit l’ukrainien littéraire grâce à ses traductions, parmi lesquelles la première édition complète de la Bible et les œuvres de Byron, Shakespeare, Goethe, Schiller, Heine.
Контракти та Контрактовий будинок у Київі, 1798-1923: культурно-історичний етюд
Place et Maison des Contrats à Kyiv : étude culturelle et historique
Fedir Ernst, auteur de Place et Maison des Contrats (Kyiv, 1924), est historien d’art et conservateur des musées, connu pour ses recherches sur le patrimoine architectural de la ville de Kyiv. Son ouvrage décrit la Place des Contrats et le Podil, centre historique de la capitale. Considéré comme l’un des fondateurs de la conservation du patrimoine en Ukraine, Ernst contribue, dans les années 1920, à la création de la Galerie nationale de Kyiv, des musées de la Laure de Petchersk, du monastère Saint-Cyrille à Kyiv et du centre historique de Tchernihiv. En 1918, il documente à vif le pogrome de la capitale ukrainienne par les unités de la Garde rouge sous les ordres de Mikhaïl Mouraviov, notamment, la destruction brutale des tableaux de la collection Terechtchenko. Dans son catalogue de l’exposition posthume de Gueorgui Narbout (1926), Ernst rend hommage à l'œuvre du célèbre graphiste.
Fedir Ernst a été arrêté deux fois par l’OGPU, en 1933 et en 1934, et condamné à trois ans de travaux forcés au chantier du canal de la mer Blanche (Belomorkanal), avec l’interdiction de retourner à Kyiv. Il a été fusillé en 1942, après sa troisième arrestation.
Pour en savoir plus
Essays in modern Ukrainian history
Contributions à l'histoire de l'Académie de Kiev (1615-1817), centre culturel et d'enseignement en Europe occidentale
From the Bible to Shakespeare
- Yury Shevelov, « L'ukrainien littéraire », Revue des études slaves, tome 33, fascicule 1-4, 1956. pp. 68-83 [en ligne].
Au pays des avant-gardes
Dans les années 1910-1930, l’Ukraine est un espace multiculturel où s’épanouissent les arts plastiques, la littérature, la conception du livre, le théâtre et le cinéma. Si Bohomazov, Malévitch, Arkhypenko, Exter, Bourliouk, Tatline, Yermilov, Sonia Delaunay sont reconnues dans le contexte des avant-gardes d’Ukraine, les noms de Les’ Kourbas, Mykola Koulich, Mykola Khvylovy, Borys Antonenko-Davydovych, Valérian Pidmohylny, Mykhayl Semenko, Geo Chkouroupiy, Mykhaïlo Boïtchouk s’inscrivent dans l’histoire de la génération de la Renaissance fusillée, exterminée par la terreur stalinienne.
La revue Nova generatsia, les groupements Lanka et MARS à Kyiv, Gart et VAPLITE à Kharkiv, le Théâtre Berezil à Kyiv et Odessa, la Kultur-Lige à Kyiv, Artès à Lviv sont parmi les phénomènes culturels les plus importants dans le paysage de l’avant-garde ukrainienne du début du XXe siècle. Ces courants sont marqués par une grande diversité politique et culturelle : c’est dans le foisonnement des discussions et des manifestes, avec l’engagement des versants juif et féministe et en lien étroit avec le modernisme européen qu’apparaissent les créations artistiques et littéraires et se développent les institutions. Dans la présente sélection, la prédominance des ouvrages publiés à Kharkiv met en vedette cette « capitale des années 1920 ».
Європа на вулкані : надзвичайна поема
L'Europe sur un volcan : un poème extraordinaire
Valérian Polichtchouk (1897-1937), poète avant-gardiste basé à Kharkiv, écrit L’Europe sur un volcan en 1925, après son voyage à travers la France, l’Allemagne, les pays baltes et la Tchécoslovaquie. Faisant référence à l’actualité politique internationale des années 1920, ce poème-pamphlet fantasme une révolution mondiale hantée par les cataclysmes, des visions d’un Paris inondé et du prolétariat français se réfugiant à Kharkiv.
Ancien membre de Gart, Polichtchouk cherche à dépasser les conventions pour créer une nouvelle littérature ukrainienne à consonance européenne, progressiste, expérimentale et libérée du provincialisme. Il se rapproche des constructivistes de Kharkiv et publie, en 1928-1929, trois numéros de la revue Avangardo (Avant-garde) en collaboration avec Vasyl Yermylov pour la conception graphique. La couverture de L'Europe sur un volcan est le plus probablement conçue par Adolf Strakhov (Braslavsky), graphiste et sculpteur connu notamment pour ses affiches de propagande dans le style du réalisme socialiste.
Valérian Polichtchouk est arrêté en 1934 et exécuté à Sandarmokh en automne 1937.
Futur extra : поезії
Futur extra : poèmes
Membre des associations Plouh et Gart, Gueorgui Kolyada (1904-1941) fréquente les cercles futuristes et publie ses poèmes dans la revue Nova Generatsiia. Entre 1924 et 1927, il rejoint SiM (Campagne et Ville), le groupement avant-gardiste ukrainien à Moscou, initié par Kost Boureviy et Volodymyr Gadzinsky. Dans l’esprit du futurisme de Mykhail Semenko, le groupement publie les recueils de poèmes et sort l’unique numéro de la revue Néo-Lif (La revue de la production littéraire du nouveau front de gauche), ayant pour but de réunir les auteurs de l’expression ukrainienne en Russie, notamment en Sibérie et au Kouban.
Le recueil poétique Futur Extra, publié à Moscou en 1927 à compte d'auteur, est une des manifestations de ce projet éditorial ambitieux qui fait paraître dans la capitale russe les textes des auteurs ukrainiens.
О. Довженко : нарис про митця
О. Dovzhenko : un essai sur l'artiste
Найважливіше з мистецтв : нарис про кіно
Le plus important des arts : un essai sur le cinéma
Ces deux brochures, publiées en 1930 par les éditions de VUFKU (Direction générale de la photocinématographie d’Ukraine), contiennent deux essais critiques de l’auteur qui a marqué la littérature et le cinéma ukrainien des années 1920 - Mykola Bazhan, grand écrivain et traducteur, l'un des rares survivants de sa génération. Afin de créer le répertoire, la VUFKU invite les écrivains et les artistes. Parmi les collaborateurs les plus connus - Mykhail Semenko, Yuriy Yanovsky, Geo Сhkouroupiy, Ostap Vyshnia, Maïk Johansen, Isaac Babel. Chef de la revue Kino, Mykola Bazhan est considéré comme l’un des fondateurs de la critique cinématographique ukrainienne.
Pendant presque neuf ans de son existence, la VUFKU (1922-1930) a sorti plus de 140 films de fiction et d’animation. Dans cette courte période, « le Hollywood ukrainien » s’efforce de créer une industrie du cinéma en Ukraine soviétique, en maîtrisant tous ses aspects – production, distribution, critique, promotion et éducation. Avec beaucoup de succès, la VUFKU présente ses films aux festivals internationaux, les exporte en Allemagne, aux États-Unis, au Japon et en France.
En 1928, les éditions de VUFKU publient le catalogue multilingue Album du cinéma ukrainien afin de promouvoir le cinéma ukrainien indépendamment de Moscou. La même année, la VUFKU se met d’accord avec Pathé-Nord pour la projection d’une dizaine des films en France, y compris notamment ceux de Dovzhenko et de Dzyga Vertov. À cette époque, les critiques français suivent de près la production cinématographique des studios d’Odessa et de Kyiv.
En 1930, la VUFKU est démantelée, et le cinéma ukrainien passe sous le contrôle de Sojuzkino de Moscou. Aujourd’hui, sur plus de 140 longs métrages de fiction réalisés par VUFKU, environ 60 films sont considérés perdus.
Pour en savoir plus
- Lubomir Hosejko, Histoire du cinéma ukrainien,1896-1995, Die, Éditions A Die, DL 2001.
- Lubomir Hosejko, « La VUFKU et ses rapports avec le cinéma français », Revue des études slaves, XCIII-4 | 2022 [en ligne].
- VUFKU. Lost&Found, projet de la médiathèque du Dovzhenko-Centre.
לידער און פאעמעס : באנד איינס / צייכענונגען פון מארק שאגאל צו דוד האפשטיין בוך "טרויער", קיעוו, 1922
Chants et poèmes : Tome 1 / Dessins de Marc Chagall pour le livre "Deuil" de David Hofstein, Kyiv, 1922
Né près de Zhytomyr en 1889, David Hofstein publie ses premiers poèmes en 1917 et rejoint le Ministère des affaires juives à Kyiv en 1918. Considéré comme l’un des plus importants écrivains yiddish d’Ukraine, Hofstein a traduit en yiddish l’intégralité du Kobzar de Tarass Chevtchenko. Publié en 1922, son recueil de poèmes Deuil est illustré par Marc Chagall. Cette collaboration entre le poète et l’artiste est née dans le cadre d’une puissante institution culturelle qui émerge en Ukraine - la Kultur Lige.
Nourri de puissants efforts multiethniques, l’élan culturel des années 1920 est à penser au pluriel. Après la chute du tsarisme en février 1917, les élites intellectuelles d’Ukraine organisent à Kyiv, en septembre de la même année, le Congrès des peuples asservis par la Russie pour discuter les voies de la transformation de l’empire en une fédération démocratique. Présidé par Mykhaïlo Hrouchevsky, il réunit les représentants de 20 nationalités, dont Biélorusses, Bouriates, Géorgiens, Estoniens, Juifs, Lituaniens, Lettons, Tatars de Crimée, Moldaves. La même année, le Ministère des affaires juives est créé au sein du gouvernement de la première République ukrainienne. La Kultur Lige (1918-1924), organisation laïque pour la promotion de la langue yiddish et de la culture des juifs d’Ukraine, débute avec une centaine de branches dans tout le pays.
Entre 1920 et 1924, la Kultur Lige, absorbée par la section juive du parti communiste (Yevsektsia), cesse d’exister. Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, les intellectuels juifs de l’URSS, notamment ceux d’expression yiddish, subissent des répressions qui culminent, le 12 août 1952, par la « Nuit des poètes assassinés ». Ce jour-là, David Hofstein, David Bergelson, Leib (Lev) Kvitko, Peretz Markish, anciens membres de la Kultur Lige originaires d’Ukraine, sont exécutés.
Pour en savoir plus
- Paul Robert Magocsi, Yohanan Petrovsky-Shtern, Jews and Ukrainians : a millennium of co-existence, Toronto, Ontario, Distributed by the University of Toronto Press for the Chair of Ukrainian Studies, University of Toronto, 2016.
Намисто. Разок перший
Collier de perles. Premier fil
Depuis sa jeunesse, Volodymyr Vynnytchenko (1880–1951) s’engage dans l’activité révolutionnaire et devient membre du Parti ouvrier social-démocrate ukrainien (USDRP) pour rejoindre, en 1917, le gouvernement de la République populaire ukrainienne en tant que président du Secrétariat général. Président du Directoire pendant une courte période au début du 1919, il démissionne en raison des désaccords politiques et quitte le pays.
Vynnytchenko est considéré comme l'un des fondateurs de la littérature moderne en Ukraine grâce à la complexité stylistique de ses œuvres - romans, nouvelles et pièces de théâtre. La première édition du Collier de perles est parue à Kharkiv en 1930, quand Vynnytchenko était déjà en exil. Ce recueil réunit les nouvelles pour la jeunesse intitulées d'après les chansons populaires. Les paroles de chansons constituent un fil conducteur du recueil, qui met en scène les personnages-enfants, rêveurs et révoltés. La couverture du livre a été conçue par Vassyl Krytchevsky (1873-1952), graphiste et architecte kharkivien, connu aussi pour son activité de décorateur de cinéma chez VUFKU.
Донбас : поема
Donbass : un poème
Ivan Dniprovsky (né Chevtchenko, 1895-1934), écrivain membre de la VAPLITE, a vécu à la maison des écrivains Slovo à Kharkiv, dont presque tous les habitants ont été réprimés. Son décès en 1934 est dû à la tuberculose, mais sa famille a été surveillée par le NKVD. Dniprovsky est auteur de poèmes, de nouvelles et de pièces de théâtre, aussi bien que d’essais critiques et de traductions du russe et du yiddish. Avec le poème Donbass (1922), il débute en tant qu'écrivain de langue ukrainienne. Comme d’autres écrivains de sa génération, il étoffe son sujet à travers le personnage d’un révolutionnaire tiraillé entre l’idéologie collective et la conscience personnelle, et le Donbass sert de toile de fond symbolique pour ce conflit.
Lors de la période soviétique, le terme de Donbass s’impose pour désigner les régions de Donetsk, de Lougansk et de la côte d’Azov. Plus économique que géographique, cette dénomination tire son origine du bassin minier de Donetsk, dont les ressources ont été exploitées par l’Empire russe depuis XVIIIe siècle. Dans les années 1920, la mythologie du Donbass se construit autour de la lutte des ouvriers, sujet clé de la littérature ukrainienne depuis la fin du XIXe siècle, ainsi que de la vision néo-romantique de l’urbanisme et de l’industrialisation. Bouleversé par les traumatismes du développement industriel impétueux, de la collectivisation, de la russification et du repeuplement en masse après la Grande famine de 1933 (Holodomor), le Donbass demeure le pilier de la culture ukrainienne. C’est une région riche en poètes, humanistes et dissidents : y sont nés, entre autres, Volodymyr Sosiura, Vassyl Stous, Mykola Rudenko, Ivan Svitlytchny, Serhiy Jadan et Liubov Yakimchuk.
Pour en savoir plus
- le site web ProSlovo, dédié à l’histoire de la résidence littéraire coopérative à Kharkiv ciblée par les répressions
- Hiroaki Kuromiya, Freedom and terror in the Donbas : a Ukrainian-Russian borderland, 1870s-1990s, Cambridge University Press, 1998.
- After the Holodomor : the enduring impact of the great famine on Ukraine, edited by Andrea Graziosi, Lubomyr A. Hajda, and Halyna Hryn, Cambridge (Mass.), Ukrainian Research Institute, Harvard University, 2013.
Pour en savoir plus
The cultural renaissance in Ukraine
Futurism and after
Kazimir Malévitch
Literary politics in the Soviet Ukraine, 1917-1934
Ukrainian futurism, 1914-1930
- L’exposition L’Art dans la vie ! La vie dans les livres ! Textes du constructivisme soviétique (BULAC, mai 2021)
Là où vivent les gens et les livres
Dans la deuxième moitié du XIXe siècle, l’Ukraine de l’ouest, notamment la Galicie et la Bucovine, devient le rempart de la vie culturelle. La politique de tolérance de l'Empire austro-hongrois, dont font partie ces régions à l’époque, permet le pluralisme des identités locales, alors que l’Empire russe interdit progressivement tout usage institutionnel et public de l'ukrainien. Les ouvrages sélectionnés mettent à l’honneur Lviv et Tchernivtsi, ces deux villes où plusieurs cultures coexistent à travers les siècles.
Lviv (Lwów en polonais, Lemberg en allemand), nommé parfois « la petite Vienne », est connue pour son rôle dans l’épanouissement de la culture du livre à partir de la deuxième moitié du XVe siècle. C’est ici qu’Ivan Fedorov publie en 1574 L’Apôtre et Boukvar (L'Abécédaire), les premiers livres imprimés en écriture cyrillique en Ukraine. Les premiers périodiques en Ukraine paraissent à Lviv : en 1776, La Gazette de Léopol, l’hebdomadaire en français, et en 1848-1857, le premier journal en ukrainien L’Étoile de Galicie. L’autre dénomination métaphorique de Lviv - « le Piémont ukrainien » - renvoie à la période qui suit l’interdiction totale de la langue ukrainienne en 1876, quand les éditeurs, la presse et les organisations politiques redirigent leurs activités vers la partie ouest du pays.
Dans la ville de Tchernivtsi du XIXe - début du XXe siècle, l'ukrainien côtoie le yiddish, le roumain, le polonais et l'allemand. « Czernowitz, où vivaient les gens et les livres » - dit Paul Celan à propos de sa ville natale, que l'on qualifie parfois de capitale littéraire secrète, car à Tchernivtsi (Cernăuți en roumain ou Czernowitz en allemand) sont nés également Aharon Appelfeld, Itsik Manguer, Rose Ausländer. Ces voix résonnent dans les lettres ukrainiennes d'aujourd'hui, car un festival majeur de poésie et de traduction, Meridian Czernowitz, s’y tient annuellement.
Agora : Colecţie internaţională de artă şi literatură
Agora : Collection internationale d'art et de littérature
Dans ce numéro unique d’Agora, la revue littéraire multilingue publiée à Bucarest en 1947, on retrouve trois poèmes en allemand, intitulés Das Gastmahl, Das Geheimnis der Farne, Ein wasserfarbenes Wild (Le banquet, Le secret des fougères, Un jeu aquarelle) et signés Paul Celan. Ces trois textes, conçus vers 1946, marquent les débuts de Paul Celan comme poète de langue allemande et une de premières occurrences de l’utilisation de son pseudonyme.
Paul Celan (né Paul Antschel, 1920-1970), a grandi dans un milieu multilingue. Après avoir fréquenté les écoles allemande, juive et roumaine, Celan accomplit en 1938 son enseignement secondaire au gymnase ukrainien, réputé tant pour la qualité de l'enseignement que pour son libéralisme social et linguistique (après l’annexion de la Bucovine du nord, les autorités roumaines l’ont rebaptisé lycée et ont supprimé l’ukrainien du cursus). Comme Celan n’a pas pu revenir en France en 1939 pour continuer ses études en médecine, il a intégré la faculté des lettres de l’université de Tchernivtsi, où il étudiait, entre autres, l’ukrainien et le russe. Son parcours universitaire a été brutalement interrompu par la Seconde Guerre mondiale.
En 1941, dans le ghetto de Tchernivtsi, la famille Antschel survit à la première vague des déportations, mais entre 1942 et 1943, le jeune poète voit ses proches disparaître dans les camps concentrationnaires. Après 19 mois de travaux forcés, il retourne à Tchernivtsi pour repartir ensuite à Budapest, puis à Vienne, et s’installe à Paris en 1948. Son poème Die Todesfuge (Fugue de mort), écrit vers la fin de la guerre, est une des œuvres littéraires les plus emblématiques de la Shoah. En Ukraine, l'œuvre de Celan est traduite de l’allemand par Mykola Bazhan, Vasyl Stous, Mark Belorusets, Petro Rykhlo et Serhiy Jadan.
Pour en savoir plus
- "Écrire, c'était vivre, survivre" : chronique du ghetto de Czernowitz et de la déportation en Transnistrie, 1941-1944, écrivains et poètes juifs de langue allemande présentés et traduits par François Mathieu, Paris, Éditions Fario, DL 2012.
- Florence Heymann, Le crépuscule des lieux : identités juives de Czernowitz, Paris, Stock, 2003.
קאטרינה
Katerina
Aharon Appelfeld, l’un des écrivains israéliens les plus connus et les plus traduits, est né en 1932 à Jadova (région de Tchernivtsi). En plus de l’allemand, la langue de sa famille, il parle le mélange de yiddish, d’ukrainien et de russe. Son enfance est marquée par l’expérience du ghetto, la déportation et la mort de sa mère pendant la Seconde Guerre mondiale. L’hébreu, qu’il a appris plus tard avec beaucoup d’efforts, devient sa langue d’expression littéraire.
Son récit Katerina, publié en 1989, revisite sous la forme d'une fiction ses souvenirs d'Ukraine et de sa ville natale. Dans son style concis et métaphorique, l’auteur relate la vie d’une femme ruthène (un des éthnonymes historiques pour désigner les Ukrainiens, surtout dans les régions de l’ouest) qui travaille comme femme de ménage dans les familles juives. Victime des contraintes et des préjugés qui règnent dans l’un des recoins les plus conservateurs et les plus rustres du pays, Katerina évolue en tant que personnage dialogique qui incarne le regard de l’autre : chez les Juifs, elle retrouve tout ce dont elle a été privée en tant qu’être humain, et découvre, à travers sa propre douleur, l’injustice que subissent ces gens qu’elle a fini par appeler les siens. La traduction de Katerina en ukrainien est parue en 2018 chez Books-XXI.
Земля : повість
La Terre : roman
Née en Bucovine dans une famille germanophone, Olga Kobylianska (1863-1942) est l’un des auteurs les plus notables de la fin-de-siècle ukrainienne. Son œuvre est influencée par le symbolisme et l’individualisme allemand, notamment, par les idées de Nietzsche. Après seulement quatre ans de scolarisation réservés aux filles, elle poursuit ses études de manière autonome, passionnée par les lettres et la philosophie, et choisit l’ukrainien comme langue d’expression littéraire.
La Terre (1902, traduit en français en 1973), roman de réflexion sociale, est devenue l’une des œuvres les plus connues d’Olga Kobylianska, grâce à l’approbation de la critique littéraire soviétique notamment. La présente édition de 1926 est préfacée par Pavlo Fylypovych, écrivain et poète du groupement des néoclassiques, qui appartient à la génération de la Renaissance fusillée (exécuté à Sandarmokh en 1937).
Olha Kobylianska met en scène la femme intellectuelle qui cherche à devenir « à soi-même sa propre fin », capable de s’opposer aux façons dont la société patriarcale détermine sa vie sociale, son corps et sa sexualité. Féministe engagée, elle rejoint, à partir des années 1890, les premières associations des femmes à Bucovine, qui s’organisent pour créer leurs espaces solidaires. Kobylianska évoque les idées d’émancipation et de sororité, tant dans ses œuvres littéraires qu’à travers ses échanges avec d’autres intellectuelles comme Sofia Okunevska, première femme médecin dans l'Empire austro-hongrois, Natalia Kobrynska, écrivaine et éditrice féministe, et Lessia Oukraïnka, illustre auteur du modernisme ukrainien.
Абу Касимові Капці : арабська казка
Les babouches d'Abou Kassem : un conte arabe
Né à Nahuievytchi près de Lviv, Ivan Franko est l’un des auteurs ukrainiens les plus importants et les plus prolifiques, à l'œuvre complexe et multiforme. Penseur profond et peu ordinaire, dévoué aux idées du progrès et de la justice sociale, Franko introduit dans son œuvre les idées de pointe qu’il retrouve dans les sciences humaines, notamment, dans la sociologie et la psychologie, ces disciplines phares du XIXe siècle qu’il voit évoluer avec un grand intérêt. Il se penche sur les recherches de Charcot et de Wundt, et suit à l’université de Lviv les séminaires de Julian Ochorowicz qui étudie le traitement de l’hystérie, l'hypnose et le magnétisme. Passionné du roman réaliste français, Franko traduit en ukrainien les textes de Hugo, Flaubert et Zola. Un des premiers en Europe, avant Germinal de Zola, il écrit, en 1881, un roman consacré à la lutte ouvrière, Boryslav rit.
Tout au long de sa vie, en tant qu’écrivain et intellectuel, Ivan Franko (1856-1916) a à cœur de faire évoluer la pensée ukrainienne en dialogue avec d’autres cultures. La portée de ses traductions est immense, en commençant par les auteurs classiques de l’Antiquité jusqu'aux contes des Mille et une nuit et fragments du Mahabharata et du Pañchatantra, en passant par Shakespeare, Goethe, Dante, Cervantès, Strindberg. Les adaptations frankiennes des contes populaires ont enrichi la littérature pour la jeunesse : Renard Mykyta, Quand les Bêtes savaient encore parler, et Les babouches d'Abou Kassem. Celui-ci est une adaptation poétique d’un conte populaire arabe réalisée en 1895. Tout en restant fidèle à la fable originale, qu’il découvre d’abord en traduction allemande, Franko approfondit l’histoire d’un vieil avare qui se transforme en derviche. L’évolution psychologique du personnage et la satire sociale suggèrent les images de la Galicie à travers les couleurs locales de Bagdad.
סדור תפלות ישראל = Sidur Tefillot Israel = Modlitewnik Israelitów
Livre de prières des Israélites
Au XIXe siècle, Lviv devient l’un des centres les plus importants de la culture hébraïque en Europe de l’Est, divisée entre les trois courants majeurs - les maskilim progressistes qui prônent la modernisation, l’enseignement, l’intégration (le mouvement de la Haskala), les représentants du judaïsme orthodoxe et ceux du hassidisme, courant mystique du judaïsme qui émerge au XVIIIe siècle en Ukraine.
Ce livre de prières bilingue en polonais et en hébreu, publié à Lviv en 1862, servait de manuel de lecture pour les enfants. Le mot sidour signifie ordre, c'est-à-dire, l’ordre des prières à lire chaque jour. Le sidour est donc le premier livre liturgique avec lequel un enfant juif commence son apprentissage de la langue et la lecture, lors d’une grande fête organisée à cette occasion. Dans cet ouvrage, les textes de prières sont précédés de l’alphabet hébraïque pour faciliter l’initiation à la lecture. On découvre ensuite les prières journalières, celles du matin (שחרית), du midi (מנחה) et du soir (ערבית), ainsi que les prières de la Nouvelle Année (ראש השנה) et du jour du Grand Pardon (יום כיפור).
Pour en savoir plus
- Page multimédia de l’histoire urbaine Jewish Lviv: History of the Community in the Space of the City
Gwałtu, co się dzieje! : Komedya w trzech aktach
Au secours, que se passe-t-il ! : Comédie en trois actes
Aleksander Fredro (1793-1876), dramaturge et auteur de comédie polonais, a déménagé en 1846 à Lviv avec son épouse et y a vécu jusqu’à sa mort. Au XIXe siècle, la vie théâtrale à Lviv est en plein essor, marquée par trois phénomènes distincts - les théâtres polonais, ukrainien et yiddish. Auteur de comédies de mœurs devenu des classiques de la littérature polonaise, Fredro est surtout connu pour ses aphorismes.
Le dramaturge a laissé une trace importante non seulement dans l’histoire du théâtre, mais aussi de la ville. C’est l’une des pièces de Fredro qui a inauguré en 1842 la scène du théâtre Stanisław Skarbek (aujourd’hui le Théâtre académique national Maria Zankovetska). Il est le grand-père maternel d’André Cheptytsky, métropolite de l'Église grecque-catholique ukrainienne, et de nos jours, une rue dans le centre historique de Lviv porte son nom.
Prędko zniknie każda trwoga,
Gdy w miłości wzrok utonie.
Toute peur s’envole rapidement,
quand le regard voit l’autre amoureusement.
Siła przed prawem – sieje bezprawia,
Prawo przed siłą – mury stawia.
La force avant la justice - cela donne le non-droit,
Le droit avant la force - le mur croît.
Traduction de Monika Merlin
Галичина : поезії
Galicie : poèmes
Le pseudonyme de Vassyl Atamaniuk (1897-1937), Yablunenko, vient du nom du village Yabluniv dans la région d’Ivano-Frankivsk où il est né. Il dédie souvent ses poèmes et récits à son pays natal, comme c’est le cas du recueil Galicie publié en 1925. Auteur de quelques dizaines de recueils, y compris pour la jeunesse, il prépare également six anthologies, dont Anthologie de la poésie d’Ukraine de l’ouest en trois volumes (1930-1931) et Nouvelle poésie juive (1923) dont il est traducteur. L'œuvre de ce poète de Galicie, révolutionnaire et lyrique, est mal connue, ne serait-ce que parce qu'il a été l’une des nombreuses victimes de la terreur stalinienne.
Pendant la Grande Guerre, Vassyl Atamaniuk fait son service militaire dans l’armée autrichienne, à la Légion ukrainienne. Après la révolution, à l’instar de nombreux écrivains de gauche, Atamaniuk rejoint le parti communiste ukraininien (dit « borotbiste »), un des principaux concurrents des bolchéviques en Ukraine. En 1918-1920, les borotbistes soutiennent les idées marxistes tout en mettant en avant la nécessité de l’autonomie des peuples dominés par l’Empire russe au sein d’une fédération qui pourrait empêcher la restauration de l'impérialisme. Arrêté à Kyiv en 1931 par le Guépéou et condamné à 5 ans de camp, il périt à Sandarmokh en 1937 pendant les exécutions de masse.
Du Pont-Euxin à la mer Noire
Dans les steppes d'Ukraine, les vestiges révèlent le passé des civilisations anciennes : les plus connus sont les céramiques de Cucuteni-Trypillia (l’importante culture proto-urbaine qui s’est développée entre 5800-2800 av. J.-C.), ou encore les menhirs et les kourganes somptueux des Scythes qui peuplaient la steppe pontique aux VIIIe-IIIe siècles av. J.-C. Vers la même période, les navires grecs arrivent sur les côtes du Pont-Euxin (la mer Noire) pour y fonder les colonies aux VIIe-Ve siècles av. J.-C (Tyras, Olbia, Chersonèse, Théodosie, Panticapée).
La colonisation moderne du sud de l’Ukraine et de la Crimée a lieu vers la fin du XVIIIe siècle, quand l’Empire russe parvient à vaincre la cosaquerie ukrainienne et le Khanat de Crimée. En 1778-1779, Catherine II réalise le projet du déplacement des populations chrétiennes de Crimée, en permettant aux Grecs de s’installer au sud du Donbass, sur la côte d’Azov. Afin d’intégrer les nouveaux territoires à la cartographie de l’Empire, les anciens ports et forteresses cosaques sont rebaptisés - c’est ainsi qu’apparaissent Odessa, Mariupol, Kherson et Mykolaïv. La sélection recueille les témoignages, anciens et modernes, de l’histoire de la région.
Chez les Tatars de Crimée : souvenirs d'une mission
Certaines populations tatares se déplacent vers la mer Noire et la mer d’Azov, poussées par l’avancée mongole en Asie centrale au XIIIe siècle. Convertis à l’islam, ces Tatares y fondent entre le XVe et le XVIIIe siècle le khanat de Crimée, allié de l’Empire ottoman. Redoutés par leurs contemporains en raison de leurs pratiques de pillage et de commerce d’esclaves, ils subissent dès la conquête russe, à la fin du XVIIIe siècle, les effets d’une politique de russification et de christianisation de leur territoire en Crimée, engendrant en partie une émigration vers les territoires restés sous contrôle ottoman. C’est dans ce contexte que le baron Joseph Berthelot de Baye (1853-1931), fait leur connaissance lors de son voyage à travers la Russie à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. Lors de ces missions d’exploration initiatique, il réunit dans ses mémoires des observations ethnologiques et des témoignages photographiques sur les contrées de l’Empire russe qu’il sillonne, entre l’Ukraine et la Sibérie occidentale en passant par le Caucase et la Mer Noire.
Η λογική γραμματική της Ελληνικής γλώσσης δια τους πρωτοπείρους παίδας
La logique de la grammaire du grec moderne pour les débutants
Cette grammaire du grec moderne est publiée à Odessa par l'imprimerie de l'École grecque de commerce. Fondé en 1817, cet établissement culturel est le plus important de la ville à cette époque, aux côtés du lycée Richelieu, et l'un des principaux foyers pour l'éducation en grec. D'après le consul français, François Sauron, parmi les 40 maisons de commerce actives à Odessa en 1832, celles gérées par la communauté grecque étaient les plus nombreuses et les plus prospères.
Reflétant l'implantation d'un réseau de commerçants depuis le XVIIIe siècle dans l'espace impérial russe, la présence de l'hellénisme est aussi le résultat de déplacements de populations depuis les territoires ottomans dans le cadre des conflits opposant les tsars russes à la Sublime Porte entre 1768 et 1829. C'est pendant cette période que plusieurs villes de l'Ukraine méridionale sont rebaptisées avec des noms grecs, telles qu'Odessa (le long voyage), Simferopol (la cité du bien commun), Marioupol (la cité de la Vierge Marie), Sébastopol (la cité de l'empereur) ou encore Cherson qui retrouve le nom de la ville ancienne de Chersonèse (péninsule).
À découvrir sur le Carreau de la BULAC : « Un îlot d’édition grécophone dans la mer d’Azov », par Nicolas Pitsos, chargé de collections pour le domaine grec
L’exemplaire de la revue Neotita édité en mai 1935 à Mariupol, trouvé dans les collections grecques les plus anciennes de la BULAC, est prétexte à démêler le fil de l’histoire d’une édition hellénophone dans la mer Noire septentrionale.
كابن خانان ياخود قريم تاريخى
Le jardin de roses des khans, ou l'histoire de la Crimée
Après son retour de la guerre russo-turque de 1806-1812, Halim Giray (1772-1823) rédige son histoire de la dynastie des khans de Crimée, dont il était un représentant. Le jardin de roses des khans retrace la généalogie de 44 souverains remontant à Gengis Khan, en commençant par Hacı I Giray, le fondateur du khanat en XVe siècle, jusqu’à son père, Şahbaz Giray. Après la conquête de la péninsule par l'Empire russe vers 1783, le dernier khan Şahin Giray est contraint à abdiquer et à se réfugier dans l’Empire ottoman. Aujourd’hui, l’emblème traditionnel de la famille Giray, le tamga, orne le drapeau et les armoiries des Tatars de Crimée.
Rédigé en turc ottoman, ce document est connu des chercheurs surtout à travers ses adaptations en turc moderne, en arabe et en russe, car il n’a jamais été traduit dans son intégralité. Avec Dı̂van-ı Halim Giray, le livre de poèmes, Gülbün-i hânân fait partie de la copie manuscrite posthume datant de 1827 de l'œuvre du prince écrivain préfacé par son père. L’édition de 1870 est l’une des plus connues.
Pour en savoir plus
- liste bibliographique sur l’histoire et la culture de la Crimée
Белетристичні писання А. Кримського : екзотичні поезії. III. Пальмове гилля
Les écrits littéraires de A. Krymsky : poèmes exotiques. III. Branches de palmier
Пальмове гилля : екзотичні поезії. IV. Частина третя (1917-1920)
Branches de palmier : poèmes exotiques. IV. Troisième partie (1917-1920)
Né d'un père tatar de Crimée et d'une mère polono-lituanienne, Ahatanhel Krymsky (1871-1942) fait ses études à Kyiv, Moscou et Saint-Pétersbourg pour devenir l’un des meilleurs spécialistes en études arabes, persanes, turques et slaves. Krymsky est tout d'abord connu en tant que linguiste et historien, pionnier des études orientales. Maîtrisant une soixantaine de langues, il est l’un des fondateurs de l'Académie des sciences d'Ukraine (1918). Dans les années 1920, il dirige l'Institut de la langue scientifique ukrainienne et mène des recherches sur la dialectologie et l’histoire de la langue. Bien que Krymsky ait survécu à la terreur des années 1930, il n’échappe pas aux persécutions et à la censure. Arrêté par le NKVD, il meurt en détention au Kazakhstan en 1942, à l’âge de 71 ans.
Son œuvre littéraire, partiellement occultée pendant l’époque soviétique, fait découvrir un auteur singulier du modernisme ukrainien, avec son roman Andriy Lagovsky et sa poésie marquée par ses voyages en Syrie et au Liban (1896-1898). Les éditions de 1922 et 1923 de Branches de palmier sont les dernières éditions de la poésie de Krymsky de son vivant. Ces recueils comprennent les traductions et les interprétations des poètes arabes et persans, aussi bien que ses poèmes des années 1898-1901, dont le cycle Amour impie (Extraits d'un roman lyrique d'un pauvre dégénéré). L’un des aspects les plus intéressants de la création littéraire de Krymsky est son lyrisme homoérotique implicite inspiré des auteurs du Moyen-Orient, ce qui permet de le considérer comme un pionnier de la littérature queer.
Pour en savoir plus
- Alexander Averbuch, "Orientalism and Homoerotic Desire in the Poetry of a Ukrainian Modernist: Ahatanhel Kryms’kyi in Lebanon", Slavic and East European Journal, vol. 62, no. 2 (2018) [en ligne, accès au texte intégral sur authentification pour les lecteurs de la BULAC].
Вишневі усмішки кримські
Sourires de Crimée
Pavlo Gubenko (1889-1956), né dans la région de Poltava, fait en 1918 son service militaire à l’armée d'UNR en tant qu’officier médical. Lors de l'avancée des armées bolchéviques, il est arrêté par le Tchéka, mais libéré en 1921 grâce au soutien de l’écrivain Vasyl Ellan-Blakytny. C’est à partir de ce moment-là qu’il devient journaliste et commence à publier ses feuilletons satiriques sous le pseudonyme d’Ostap Vychnia (vychnia - la cerise griotte en ukrainien). En plein essor des années 1920, il est membre des groupements littéraires Plouh et Gart, éditeur et scénariste chez VUFKU.
Surnommé « roi des tirages », Vychnia est l’un des auteurs ukrainiens les plus lus. Publiés par millions d’exemplaires, ses recueils humoristiques popularisent la lecture et suscitent l’intérêt pour la langue ukrainienne. Il est apprécié par ses lecteurs notamment pour ses Sourires, anecdotes ironiques sur la vie quotidienne. Sourires de Crimée est un exemple de ces recueils qui mélangent le rire et la réflexion. À travers les pages de ce livre menu, on découvre l’histoire et la géographie de la presqu’île, les mœurs des Tatars de Crimée, le quotidien des touristes, la beauté des paysages de Yalta et Hourzouf, ainsi que l’étude comparée des dauphins et des écrevisses, ou encore de la poésie de Pouchkine et des futuristes.
En 1933, Ostap Vychnia est arrêté et envoyé aux camps du Goulag où il passe dix ans avant de retourner en Ukraine en 1943, évitant de justesse l'exécution.
Pour aller plus loin
Une bibliographie d'une centaine de titres dans le catalogue de la BULAC
Bukowina moja miłość
Beyond memory
A laboratory of transnational history
Autour de la gare | suivi de Joseph Shur
After the Holodomor
A prayer for the government
"Écrire, c'était vivre, survivre"
Contributions à l'histoire de l'Académie de Kiev (1615-1817), centre culturel et d'enseignement en Europe occidentale
Between Russians, Ottomans and Turks
Nos intervenants
Chargée de collections pour les domaines ukrainien et biélorusse à la BULAC de 2021 à 2023.
Née à Kyiv, Ukraine. En 2007, après avoir obtenu son master en lettres à l'Université linguistique de Kyiv, Iryna Sobchenko rejoint le département de la littérature comparée de son alma mater en tant que chargée de cours. En parallèle de son parcours académique, elle traduit des textes de fiction et de poésie du français et de l'italien, ainsi que des essais de philosophie et de critique littéraire. Ses traductions des œuvres d'Agota Kristof, de Noëlle Revaz ou de Pietro Aretino ont paru dans la revue Prostory, et Le noir est une couleur de Grisélidis Réal en ukrainien, chez l'éditeur Books XXI. En 2013, elle part pour Genève afin de travailler sur son projet de recherche consacré à la littérature suisse, intégré plus tard dans sa thèse en cours sur l'écriture minimaliste.
Florence Chapuis est conservateur en chef des bibliothèques et agrégée de lettres modernes. Elle est responsable de l'équipe Europe balkanique, centrale et orientale et chargée de collections pour les domaines finnois et estonien, à la BULAC depuis 2021, et a été responsable de la Bibliothèque nordique (2011-2020). Elle est membre du Comité français du Fonds Descartes, qui vise à encourager les traductions d'essais et d'ouvrages scientifiques du suédois au français. Elle a mené plusieurs actions en faveur de la traduction (lectures, rencontres, partenariat avec la maison d'édition Au Nord les étoiles, spécialisée dans les classiques de la littérature jeunesse nordique).
Responsable adjointe du pôle Développement des collections et chef de l'équipe EBCO (2021-2022)
Responsable du pôle Développement des collections (2022-)
Benjamin Guichard est conservateur en chef des bibliothèques, directeur scientifique de la BULAC depuis 2015.
Chargée de collections pour le domaine russe, auparavant conservatrice à la bibliothèque du Musée littéraire A. S. Pouchkine de Saint-Pétersbourg.
Chargée de la conversion rétrospective pour le domaine hébreu
Chargée de collections pour les domaines letton et lituanien de 2021 à 2023
Chargée de collections pour les domaines polonais, tchèque, slovaque et sorabe
Chargé des collections du domaine grec de la BULAC depuis 2017, chef de l'équipe EBCO (Europe balkanique, centrale et orientale) de 2017 à 2020.
Docteur en histoire, qualifié aux fonctions de maîtres de conférences en histoire moderne et contemporaine et en études grecques, Nicolas Pitsos est chargé de cours d'histoire à l'Institut catholique de Paris (ICP) et à l'Institut catholique d'études supérieures (ICES) où il enseigne l'histoire de l'Europe du Sud-Est. Nicolas Pitsos est chercheur associé au Centre de recherches Europes-Eurasie (CREE, Inalco) et au Centre d'histoire culturelle des sociétés contemporaines (CHCSC, université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines). Spécialisé dans l'histoire de la presse, il est membre du réseau Transfopress.