La diffusion des savoirs dans le Japon des Tokugawa
À l’époque des Tokugawa (1600-1868), le Japon voit éclore de nombreuses traditions savantes, s’appuyant sur des publications largement diffusées. Ces livres s’inspirent des apports chinois, mais, au fil du temps, des préférences japonaises se dessinent sous l’effet de l’émulation entre écoles, du goût de l’observation et des besoins économiques. Le souci de faciliter la lecture et le soin apporté aux illustrations sont des traits dominants de cette production.
Commissariat
Anaïs Delmotte, chargée de la conversion rétrospective pour le domaine japonais (BULAC) et Annick Horiuchi, professeur des universités, historienne des sciences du Japon prémoderne (Université Paris Cité).
L’époque des shogun Tokugawa (1600-1868), ou époque d’Edo, ville où les Tokugawa établissent leurs quartiers, est marquée par une rapide diffusion des savoirs dans la société. Celle-ci est soutenue par le développement de l’édition commerciale et des techniques xylographiques. L’activité d’impression se concentre d’abord dans la région centrale de Kyoto et d’Osaka au XVIIe siècle, puis s’étend progressivement à Edo et aux autres villes de province. Des savoirs techniques, jusqu’alors réservés à l’aristocratie de cour et aux moines bouddhistes, vont ainsi être partagés par des lecteurs d’origines sociales diverses : guerriers, marchands ou encore paysans.
Les libraires s’attachent d’abord à importer et à rééditer des classiques chinois de la littérature confucéenne ou bouddhique. Ils se tournent ensuite vers les traités chinois – plus rarement coréens – de médecine, de materia medica (j. honzō, c. bencao), de mathématiques, d’astronomie calendaire, de techniques agricoles, ou encore vers les encyclopédies à usage domestique, qui connaissent un grand succès en Chine sous les Ming (1368-1644).
Pour les ouvrages écrits en chinois ou dans une langue savante proche du chinois, les éditeurs de l’archipel font un travail patient consistant à doter les textes de signes diacritiques et de lectures en kana (syllabaire japonais) pour en faciliter l’accès. Enfin, les commentaires en langue vernaculaire des traités continentaux se multiplient, avant de laisser place à des traités écrits en japonais par des savants désormais mûrs pour explorer de nouveaux horizons. Les savants japonais brillent particulièrement par leur inventivité dans le domaine des mathématiques, domaine qui évolue dans le sens d’une plus grande abstraction, mais aussi selon une esthétique qui lui appartient en propre. En médecine, tous les efforts tendent à rapprocher la pratique d’une connaissance empirique du corps humain. Enfin, l’environnement naturel est une source insatiable de curiosité, curiosité tournée aussi bien vers les produits les plus proches que les plus lointains.
Devant l’intérêt grandissant du monde lettré pour ces ouvrages techniques, le bakufu lève en 1720 l’interdiction qui pesait jusqu’alors sur les ouvrages jésuites à contenu scientifique. Les savants découvrent alors les techniques d’astronomie et de mathématiques d’origine occidentale utilisées en Chine pour produire le calendrier. À cette ouverture, viendra s’ajouter, à partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle, la découverte des traités scientifiques en langue hollandaise. C’est en déchiffrant tant bien que mal ces traités que les lettrés japonais découvriront des champs de savoir dont ils ignoraient jusqu’à l’existence comme la physique ou la chimie.
La vie culturelle à l'époque des Tokugawa
Découvrez différents aspects de la vie culturelle japonaise pendant le shogunat Tokugawa (1603-1867) : arts, livres, estampes, cartes, sciences...
Une sélection d'ouvrages disponibles au prêt, à retrouver du 29 août au 10 septembre à l'entrée de la bibliothèque.
Empires en marche
Edo culture
Cultivating femininity
Du pinceau à la typographie
Estampes bouddhiques japonaises
Epidemics and mortality in Early Modern Japan
Confucianism and Tokugawa culture
A history of Japanese astronomy
Cet atelier, organisé à la BULAC en partenariat avec l'Université Paris Cité, propose une première approche du travail sur la documentation patrimoniale japonaise. Il est plus spécifiquement consacré à l'étude de la relation entre texte et image au travers de...
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Nos intervenants
Chargée de la conversion rétrospective pour le domaine japonais de 2018 à 2022.
Découvrir le portrait d'Anaïs Delmotte sur le Carreau de la BULAC
Professeur des universités à l'Université Paris Cité, historienne des sciences du Japon prémoderne