
Maître de conférences en anthropologie à l'Inalco (CERMOM), il est codirecteur scientifique des Presses de l'Inalco et directeur adjoint du département Eurasie.
Au XXe siècle, les imprimeries d’Istanbul et d’Europe font émerger un continent religieux méconnu : l’islam alévi. Cet islam initiatique est profondément transformé sous la République de Turquie avec l’effondrement partiel de son organisation religieuse et l'émergence de revendications qui en font un enjeu politique autant qu'un objet d'étude scientifique. L'exposition s'appuie notamment sur la riche collection rassemblée par l'anthropologue Altan Gökalp (1942-2010).
Altan Gökalp, Têtes rouges et bouches noires : une confrérie tribale de l'Ouest anatolien. Paris : Société d'ethnographie, 1980. Collections turques de la BULAC, TURCO 8-492.
Nicolas Elias, maître de conférences à l'Inalco (CERMOM)
Mélissa Esen Quilcaille, chargée de collections pour le domaine turc
Âşık Garip ile Şah Senem. Istanboul : İstanbul Maarif Kitaphanesi ve Matbaası, 1959. BULAC BR 8 10168.
E. Borrel, « Sur la musique secrète des tribus turques Alévi », in Revue des Etudes Islamiques, année 1934, Cahier II. Paris : P. Geuthner, 1935. Collections turques de la BULAC, BIULO TURBR.28(41).
Maxime Ruscio / BULAC
Au XXe siècle, les imprimeries d’Istanbul et d’Europe font émerger un continent religieux méconnu : l’islam alévi.
Cet islam initiatique se fonde sur l’enseignement de saints turcophones de l’Anatolie médiévale, au premier rang desquels Hacı Bektaş Veli (XIIIe siècle). Au nom de ces derniers, les fidèles prônent un islam « intérieur » (batıni), fortement imprégné de chiisme duodécimain, et structuré, jusqu’à récemment, en société initiatique. À la lecture du Coran, ils substituent le chant de poésies issues d’un riche répertoire mystique. À la prière en commun à la mosquée, ils opposent l’assemblée secrète des initiés lors de liturgies dénommées cem (« union »), qui se tiennent sous la direction du descendant de l’un des saints vénérés.
Longtemps pratiquée dans le plus grand secret par des populations exclusivement rurales, l’alévisme était considéré comme hérétique par les oulémas de l’Empire ottoman et les fidèles accusés des pires débauches. Ce n’est qu’à l’aune de la République de Turquie que cette foi fera l’objet d’un fort intérêt scientifique et politique. La multiplication des écrits à son sujet, ainsi que la migration massive vers les métropoles de Turquie et d’Europe, transformeront en profondeur un alévisme qui sera parfois érigé en étendard d’un islam proprement « turc » ou « séculier ».
Maxime Ruscio / BULAC
Malgré ces investissements idéologiques, les alévis resteront victimes de discriminations, et en bute à des violences sporadiques. À partir des années 1990, des associations urbaines porteront les revendications alévies à une reconnaissance étatique. Si celles-ci n’aboutissent pas en Turquie, elles trouveront un écho positif en Europe. L’alévisme est aujourd’hui reconnu comme communauté religieuse spécifique en Allemagne, en Autriche, en Suisse ou encore en Angleterre. Fortement oralisée et partisane du secret au siècle dernier, cette foi initiatique est ainsi devenue l’objet d’un enseignement en théologie dans les universités de Vienne et d’Hambourg.
L’exposition vise à présenter un siècle d’imprimés sur l’alévisme et les alévis, des villages anatoliens aux métropoles d’Europe de l’Ouest. Elle s’appuie notamment sur la riche collection rassemblée par l’anthropologue Altan Gökalp (1942-2010).
Altan Gökalp sous la direction de Eric de Dampierre, Têtes rouges et bouches noires, les çepni, paysans sans terre du Méandre. Thèse soutenue à l'Université Paris Nanterre, 1977. Collections turques de la BULAC, BIULO GEN.II.3047.
Maître de conférences en anthropologie à l'Inalco (CERMOM), il est codirecteur scientifique des Presses de l'Inalco et directeur adjoint du département Eurasie.
Chargée de collections pour le domaine turc